LA PERSPECTIVE D’UNE BIOLOGISTE A KOMODO
En tant que biologiste, une des choses qui m’impressionne plus que tout est la biodiversité et les habitats vierges, surtout car peu d’endroits permettent de voir les deux. Darwin (ou de son surnom en biologie, le père de l’évolution) se lança dans son épopée sur le Beagle il y a 187 ans.
Je ne peux m’empêcher de penser qu’être sur l’Adelaar est similaire à ce que Darwin a pu ressentir. Le paysage est fertile par endroits et luxuriant par d’autres. La flore et la faune sont grandioses. Les couchers de soleil et les étoiles au milieu de l’océan sont spectaculaires.
Peu de gens savent que Darwin était malade pendant la plupart de son voyage de cinq ans sur le Beagle et passait le plus de temps possible sur la terre ferme. Heureusement pour moi, l’Adelaar était bien plus luxurieux que le Beagle et ma croisière bien moins nauséeuse que la sienne.
Une autre grosse différence entre son périple et le mien est que j’ai pu passer beaucoup de temps sous l’océan. La plongée sous-marine est une de mes passions. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je suis devenue une biologiste marine. Quand j’étais petite, je passais mon temps au fond de la piscine prétendant être la petite sirène. Les choses n’ont pas beaucoup changé. Par moments, je murmure cette chanson si familière lorsque je suis entourée d’un tourbillon de poissons colorés (ce qui arrivait souvent pendant cette croisière).
En tant que scientifique, j’ai eu la chance de plonger dans beaucoup d’endroits dans le monde, Moorea, Raja Ampat, Nouvelle Zélande et Monterey, CA pour ne nommer que ceux-ci. Komodo a rejoint mon top des destinations. Les coraux sont sans doute certains des meilleurs que j’ai vus dans le monde et la biodiversité est épatante.
Komodo fait partie du triangle de corail qui comprend 76% des espèces de corail du monde.
Ainsi, le triangle soutient plus de vie aquatique que n’importe où sur Terre. Voici une belle analogie – vous rappelez-vous de la scène dans Nemo quand lui et son père nagent par-dessus le récif lors de son premier jour d’école? Plonger dans cette zone, c’est comme ça. À Komodo, il y avait des coraux durs, mous, des éponges, des tuniciers, des anémones. Et ce n’était que la communauté stationnaire. Au-delà de ça, il y avait des raies manta, des barracudas, des thons, des serpents de mer, des crevettes mantes, des nudibranches, des morues et bien plus de poissons que je puisse lister sans vous ennuyer!
Bien que la faune géante charismatique (baleines, requins baleines, dauphins, etc.) monopolise souvent l’attention, en tant que biologiste, ce sont les petits organismes peuplant le récif qui sont les stars du film. Ces petites créatures et leurs adaptations pour survivre sur le récif me fascinent. Une de mes préférées est la nudibranche. Ce sont de petites limaces de mer avec des adaptations uniques.
- Elles sont extrêmement colorées (un avertissement qui signifie “fais gaffe!”).
- Les “poils” sur leur dos sont en réalité leurs branchies (d’où leur nom, nudi-branch = branchies nues).
- Elles sont hermaphrodites (car quand on est aussi lent, il vaut mieux être prêt le moment venu!).
- Elles peuvent manger les cnidocytes (cellules irritantes) des méduses, des hydroïdes et des anémones pour s’armer contre leurs prédateurs.
L’archipel indonésien est bien connu pour ces créatures flamboyantes et elles ont été la cerise sur le gâteau pendant mon voyage sur l’Adelaar. J’ai vu au moins 15 espèces différentes de nudibranches. Ce n’est pas pour autant que la faune géante charismatique n’ait pas sa place sur le récif. C’est simplement pour ça que le récif est sain et capable de soutenir l’existence de gros animaux tells que les requins, les raies et les baleines. Cette faune géante aide en réalité à protéger les petites espèces du récif. En science, celles-ci s’appellent les “espèces parapluies” car elles agissent comme un parapluie pour protéger les autres animaux qui n’attirent pas l’attention (comme les nudibranches de 2 cm).
La plupart de la faune sur le récif a un rôle et tous cohabitant en harmonie. Dans les récifs maladies, ces toiles s’écroulent et les conséquences sont catastrophiques pour la biodiversité. À cause du réchauffement, du blanchiment des coraux, de la pêche à la dynamite et au cyanure, la pêche industrielle, les communautés des récifs du monde sont en danger. Trente pourcents de la Grande Barrière de Corail, le plus gros récif barrière du monde, a souffert un blanchiment à cause d’une vague de chaleur en 2016. Étant donné que les coraux préfèrent une température plus basse, le réchauffement des océans est problématique. À cause du commerce de poissons pour les aquariums, la pratique de la pêche au cyanure est commune et un danger pour les récifs autour du monde. Le but de cette technique est d’étourdir les poissons afin de les capturer facilement. Cependant, ce poison tue d’autres organismes, dont les coraux.
Ceux-ci ne sont qu’un fragment des menaces auxquelles les récifs coralliens font face. Si nous voulons continuer à visiter des endroits comme Komodo dans le futur, nous devons avoir conscience de ces problèmes et faire attention à l’impact que nous avons sur ces communautés tout aussi fragiles qu’importantes.
Mes plongées à Komodo font partie des meilleures plongées de ma vie.
En tant que biologiste marine, assurer la survie et la prospérité de ces communautés est primordial. Mon Espoir pour le futur est que les gens voyagent dans cette région et se rendent compte de la beauté et l’importance des récifs. Ainsi, peut-être pourrons-nous les protéger, pas seulement ici, mais dans tous les océans.
A propos de Megan…
Megan Meyers est une biologiste marine et une doctorante à l’Université de Western Australia. Elle travaille en collaboration avec l’Australian Institute of Marine Science, sur l’écologie spatiale des requins-baleines et autres pélagiques. Megan a obtenu sa maîtrise à l’Université d’Auckland en étudiant la démographie et l’écologie des mouvements des requins-baleines dans la baie de Cenderawasih, en Indonésie, dans le cadre d’une collaboration avec Conservation International. Elle a été chercheuse sur le terrain, enseignante et naturaliste et espère devenir professeur de recherche à l’avenir.
Le crédit de toutes les photos de Megan revient à Rick. Rick McCawley est un photographe, designer et professeur de “graphic design” à Broward College, Ft. Lauderdale, Floride. En 12 ans comme photographe résident pour le Miami Herald, il a pris une balle pendant des émeutes, a plongé pour capturer les premières photos du bateau à trésor “Nuestra Señora de Atocha”, et vécu dans une caravane pour documenter la vie après l’ouragan Andrew (avec l’équipe de service public du Prix Pulitzer). Cliquez ici pour lire sa biographie complète.